" Certes, on comprend parfaitement la déception des vignerons qui ont besoin de telles manifestations pour faire connaître leurs produits et l’amertume des organisateurs qui ont dû passer beaucoup de temps à préparer ces festivités qui n’auront finalement pas lieu, mais à lire les réactions dans la presse, je suis très gêné par l’impression qui se dégage, celle d’une certaine inversion des valeurs. Désormais, les méchants seraient les anti-racistes et les gentils seraient les pauvres militants d’extrême droite que l’on empêche de travailler.
Il faut bien savoir de qui l’on parle ici. Les dirigeants de la Flamme angevine, et on peut leur reconnaitre ce mérite, ne cachent pas leur idéologie violente, comme le prouvent leurs nombreuses condamnations et convocations par la justice, pas plus tard que mardi dernier 7 mai 2024 pour dégradations, diffamation envers les magistrats, outrage à un corps constitué et ...provocation au meurtre. C’est aussi une idéologie qui tue comme l’atteste le meurtre par balles en 2022 de l’ancien rugyman Federico Martin Aramburù, boulevard Saint Germain, à Paris, pour lequel Loïk Le Priol, un proche des dirigeants de la Flamme angevine, est en prison dans l’attente de son procès.
Cette idéologie a déjà été au pouvoir en France, c’était entre 1940 et 1944, sous la botte du maréchal Pétain. Quel rapport me diriez-vous entre les vendeurs de fouées et le régime de VIchy ? Il suffit de regarder en direction du défilé de jeudi dernier, en plein Paris, des nostaliques du péainisme, comme tous les 9 mai. En effet, parmi les organisateurs de ces manifestations annuelles de l’extrême droite française, figurait l’Alvarium, association fondée et « kommandée » par l’un des dirigeants de la Flamme angevine, avant sa dissolution décidée par le Ministre de l’Intérieur en 2021 et confirmée par le Conseil d’Etat en novembre 2023. On ne peut trouver de filiation idéologique plus claire !
A l’heure où l’on s’apprêtent à inaugurer, près de la gare d’Angers, un monument commémoratif pour entretenir le souvenir du « convoi n°8 » par lequel plus de 800 juifs de l’Ouest ont été déportés directement à Auschwitz-Birkenau pour y être assassinés, il serait bon de se rappeler que ces victimes, dont un grand nombre étaient des citoyens français, ont été arrêtées par les fonctionnaires du régime dirigé par Philippe Pétain, prêts à faire du zèle sur le dos des Juifs pour donner des gages de compétences aux nazis.
A partir du moment où l’on milite ouvertement pour une cause, cela relève de l’engagement politique et l’on devient alors un personnage public. Inviter la Flamme angevine et ses militants d’une extrême droite assumée plutôt qu’un autre vendeur de fouées, c’est contribuer volontairement ou involontairement à banaliser si ce n’est à promouvoir la cause pour laquelle ces militants se sont fait connaître. Dans le ca de la fête des vins de Chalonnes, il ne s’agit donc pas du tout de savoir qui « vote la marchande de pommes », mais bien de savoir au service de quelle idéologie va être utilisé l’argent que j’ai dépensé pour acheter des fouées.
C’est quand même invraissemblable qu’à la veille des célébrations du 80e anniversaire du Débarquement en Normandie durant laquel 10 000 jeunes hommes sont morts pour libérer la France d’une idéologie mortifère, on puisse reprocher à des habitants et des élus de Chalonnes-sur-loire de s’offusquer de la présence dans leur ville de partisans assumés de cette même idéologie ! On me dit que les militants d’extreme droite ont le droit de travailler. Certes. Les personnes ayant purgé une peine pour pédophilie aussi. Les laisserait-on pour autant tenir un stand de barbe à papa en connaissance de cause ? Le respect de la loi et des grands principes ne doit pas nous empêcher de garder les yeux ouverts face à tout ce qui nous menace, on n’est pas obligé de tendre le bâton pour se faire battre !
Puisque l’annulation de la fête de vins cette année est un désastre, que celui-ci nous serve au moins à nous poser les bonnes questions : qui, entre les racistes et les anti-racistes, ont fait le plus grand nombre de morts ? Les drames qu’ont connus les Européens dans leurs histoire doivent-ils être oubliées ? Les adeptes des idéologies totalitaires qui les ont provoqués sont-ils vraiment moins dangereux aujourd’hui ? Et enfin, les valeurs démocratiques ne méritent-elles pas que l’on fasse des sacrifices pour les défendre et honorer ainsi la mémoire de ceux qui ont donné leur vie pour elle ? "