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La tentation éco-fasciste : migrations et écologie



Alors que la question du « monde d’après » est sur toutes les lèvres et que la crise du capitalisme s’accentue, il nous a semblé important de nous interroger sur ce que pourrait être une politique éco-fasciste. À quoi pourrait ressembler une alliance entre le « vert » et le « brun » ?

En 2019, le nombre de migrants internationaux à l’échelle mondiale a atteint 272 millions selon l’ONU, soit une augmentation de 51 millions par rapport à 2010. Cette même année 2019, le jour du « dépassement écologique » mondial, soit la date à partir de laquelle l’humanité a consommé plus de ressources naturelles et émis plus de gaz à effet de serre que la Terre n’est capable d’en produire et d’en absorber au cours d’une année, a été atteint le 29 juillet. Quelques mois auparavant, le 25 avril, un rapport affirmait que 14 % des emplois des pays membres de l’OCDE allaient disparaître en raison de l’automatisation, et que 31,6 % des activités seraient quoiqu’il en soit transformées par celle-ci. Le 15 mars, à Christchurch, en Nouvelle-Zélande, un homme répondant au nom de Brenton Tarrant, équipé d’armes de guerre, tuait dans plusieurs mosquées 51 personnes et en blessait 49 autres. Enfin, le 3 août, à El Paso, ville frontalière du Texas, Patrick Crusius attaquait à l’arme automatique un supermarché fréquenté par des latinos, tuant 22 personnes et en blessant 26. Quatre phénomènes apparemment étrangers, mais néanmoins reliés les uns aux autres par la dynamique du capitalisme, qui tend à épuiser « en même temps les deux sources d’où jaillit toute richesse : la terre et le travailleur » (Marx).

Que le capitalisme épuise la nature, ses sols, ses fleuves, ses forêts, ses océans, son atmosphère et ses habitants non-humains, nous n’en avons désormais que trop conscience, aussi est-il inutile de s’attarder sur ce point. Qu’il épuise le travailleur, non seulement au sens banal où il l’exploite mais plus encore parce qu’il tend à détruire le travail salarié dont il a pourtant fait la condition sine qua non de la survie matérielle, voilà qui est peut-être un peu moins clair. Sans trop entrer dans le détail de leurs théories, il vaut donc la peine de rappeler que de nombreux auteurs estiment que le capitalisme est entré depuis les années 1970 dans une période de crise structurelle, dont la raréfaction du travail – voire même, selon certains, la fin du travail, en raison du remplacement tendanciel des activités salariées par des machines – est l’un des principaux symptômes.

Or cette raréfaction conjointe du travail et des ressources entraîne logiquement la multiplication d’êtres humains « inutiles » ou « non-rentables » du point de vue de l’accumulation du Capital ; « Ce n’est plus, écrit le groupe Krisis dans son Manifeste contre le travail, la malédiction biblique, ‘tu mangeras ton pain à la sueur de ton front’, qui pèse sur les exclus, mais un nouveau jugement de damnation encore plus impitoyable : ‘tu ne mangeras pas, parce que ta sueur est superflue et invendable’ »3. Ces humains « inutiles » sont qui plus est « encombrants », dans la mesure où, n’ayant pas renoncé au désir de vivre et de survivre, ils souhaitent malgré tout pouvoir obtenir leur part de ressource et de richesse. La crise du capitalisme provoque donc aussi un accroissement de la compétition pour l’accès au travail et aux ressources, tant chez les individus qui sont privés de cet accès que chez les personnes qui en bénéficient tout en le jugeant menacé.

Dans la tête d’un éco-fasciste

Autant de facteurs qui poussent un nombre croissant de personnes à quitter leur lieu de naissance ou de résidence dans l’espoir de retrouver ailleurs une place et une utilité. Si l’articulation de ces trois premiers phénomènes que sont la détérioration des conditions de vie sur Terre, l’automatisation et la migration semble donc relativement claire, comment les relier aux tueries de Christchurch et d’El Paso ?

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