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A quoi sert un média autonome aujourd’hui ?



Samedi 7 septembre, une après-midi de discussions était organisée à la Parole Errante de Montreuil à Paris, sous le titre “L’autonomie n’est jamais finie”. Différents groupes et médias autonomes de la région parisienne y ont débattu des leçons de la dernière séquence de lutte et des nouvelles perspectives ouvertes par le mouvement des Gilets Jaunes. Plusieurs centaines de personnes étaient présentes et ont contribué aux échanges. Nous reproduisons ici l’intervention de membres d’ACTA lors de la première table ronde consacrée au rôle des médias.

1. Une première fonction : la contre-information. La contre-information consiste fondamentalement à exposer, à rendre visible, public, ce que le pouvoir cherche à refouler, à cacher. C’est une opération de dévoilement de l’adversaire. Aujourd’hui, un terrain privilégié de la contre-information est celui des violences policières. Alors que c’est un phénomène qui est systématiquement minimisé voire nié en bloc par les institutions, le rôle des médias autonomes – en particulier à travers l’usage de la vidéo – va être de faire voir la brutalité policière à l’oeuvre, d’imposer la reconnaissance de cette réalité, pour battre en brèche le discours gouvernemental. Démontrer le caractère systémique des violences policières, contre l’hypothèse de bavures accidentelles.

(La vidéo, de ce point de vue, apporte des preuves qui souvent laissent peu de place au doute, la puissance de l’image renforçant le caractère incontestable de la démonstration.)

Un autre terrain va être celui de la révélation des mensonges d’État. Parmi les exemples récents, citons le travail réalisé par Nantes Révoltée suite à la mort de Steve – le recueil de vidéos et de témoignages démontrant que la chute des participants à la fête de la musique dans la Loire était directement dûe à une charge policière, contrairement à ce qu’affirmait le ministre de l’intérieur. Pour continuer avec Castaner, on peut penser au 1er mai de cette année et à la diffusion extrêmement rapide de vidéos démontant la thèse d’une attaque de l’hôpital de la Salpêtrière par des groupes de casseurs. (Bien sûr ce rôle de contre-information peut être ponctuellement assumé par d’autres médias, qui disposent d’une tout autre audience, et se déterminent en fonction de tout autres critères politiques, comme Mediapart ou le Canard Enchaîné par exemple.)

De manière générale, on peut dire que la contre-information a pour but de saboter la communication du pouvoir, de la rendre inopérante, de la discréditer.

Mais il faut ajouter que la contre-information ne se borne pas à enquêter sur l’ennemi, elle ne se limite pas au dévoilement de l’adversaire, elle vise aussi à montrer, à donner corps à des réalités sociales et territoriales qui sont structurellement exclues et invisibilisées par le pouvoir. Elle vise à donner la parole à des gens qui, dans les médias dominants en tout cas, n’ont jamais le droit à la parole, dont on n’écoute jamais le discours. On pense au travail que réalise Arnold de L’écho des banlieues depuis pas mal de temps, à travers des reportages dans les quartiers populaires, où il laisse la parole à cette jeunesse des quartiers, issue de l’immigration post-coloniale, dont les médias dominants parlent en permanence, et qu’on n’entend jamais. Construire la visibilité de cette composition sociale, c’est aussi une tâche de la contre information.

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