Brèves Migration / Solidarités

Notes sur une semaine de boulange à la frontière



Depuis un peu plus de 2 ans. des boulangèr.es du réseau de l‘Internationale Boulangère Mobilisée (aka l‘I.B.M.) s‘alternent entre Calais et Dunkerque pour faire du pain pour les distribitions alimentaires adressées aux personnes migrantes.
Ci-suit le retour d’une semaine de boulange datant de la dernière semaine du mois de janvier 2024.

Ici la frontière c’est la mer, la Mer du Nord, entre la France et l’Angleterre.
La mer, on ne l’a pas vraiment vu en soit.
Ou un peu.
Les mouettes dans le ciel.
Les panneaux blancs avec écrit « Port » en italique.
Ou encore les vêtements mouillés des migrant.es de retour d’une traversée ratée.

La boulange, c’est l’I.B.M.,
C’est-à-dire l’International Boulangère Mobiliséedurant.
(rien que ça)
Un four à pain sur remorque dans une cour avec un petit fournil en dure.
Presque 60 kilos de pains par jours, dont 30 kilos de pains de mie, avec peu de croûte.
(beaucoup ont des problèmes de dent)
Des pains plats, des cookies, des namourras, des brioches.
De quoi changer de la récup’.
De quoi avoir de tout, toujours en quantité.
Bien frais.

On alterne entre la boulange et la frontière.

La boulange est recluse, dans un petit nid.
On a le nez dans la farine et le levain.
Le feu dans le coin de l’œil.
On traîne au lit.
On pétrit à l’abri du vent.
On enfourne dans la chaleur du four.

La frontière, elle, est exposée.
Il faut se lever avant le soleil.
Ne pas trop s’approcher.
Rester au bord de la frontière.
À la jungle de Grande-Synthe.
Avec les personnes migrant.es.
Là où iels attendent pour traverser.
On accompagne l’association Help4Dunkerque pour servir du thé, du café et du lait chaud.
Des biscuits ou des tartines.
Parfois de l’éléc pour charger les tèls.
Parfois des tondeuses et des miroirs.

Total construit des barrières autour de la zone.
De grandes barrières vertes.
Bientôt, il y aura une expulsion.
On observe.
Quand un bateau arrive en Angleterre, des coups de feux sont tirés.
Certain.es ont déjà essayés de traverser neuf fois.
Certain.es viennent se faire un stock de tartine.
Peut-être pour une nouvelle tentative, pour avoir de quoi manger en attendant le départ, caché.es dans la dune.
Peut-être que demain, on ne les reverra plus.
On espère.

Parfois, certain.es d’entre nous vont à la frontière.
La vrai.
Iels accompagnent Utopia pour des maraudes sur la dune.
Iels prennent des cookies à distribuer entre les flics et la mer.
Il est toujours important qu’il y ait des chasubles associatifs sur la sable au moment des traversées.
Pour rappeler au flics qu’iels n’ont pas tous les droits.
Que dans leurs devoirs, iels doivent aussi assistance à personnes en danger.

Par une boulangère de l’I.B.M.

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